Choisir son whisky en descryptant son étiquette

Lorsque que l’on est novice, décrypter l’étiquette d’une bouteille de whisky peut devenir un véritable casse-tête. Comment s’y retrouver dans ce dédale d’informations et savoir ce que l’on est réellement sur le point d’acheter ? Comment être sûr qu'une bouteille sera gustativement proche d’une autre ? Quelles sont les raisons des écarts de prix qui séparent deux bouteilles qui paraissent pourtant similaires au premier coup d'œil ?
Ce guide est justement là pour vous aider à identifier et à comprendre les différents éléments que l’on peut retrouver sur les étiquettes, pour que vous soyez en mesure de répondre par vous-même à ces questions comme un pro !
Pour vous faciliter cet apprentissage nous avons séparé les différentes informations en 3 parties, des plus générales au plus pointues, pour appréhender la découverte d’une étiquette comme celle d’un lieu. Dans un premier temps un point de vue général permet de déterminer le type et quelques informations basiques, puis en vous en approchant vous arrivez petit à petit à identifier les détails qui le rendent unique.
Mais avant de commencer il convient de préciser que le whisky produit par une distillerie n’est pas toujours vendu uniquement en son nom propre. Certains négociants achètent du vrac pour le compte de leur propre marque. C’est ce que l’on appelle les embouteilleurs / embouteillages indépendants. A contrario, les bouteilles produites en direct par la distillerie sont appelées embouteillages officiels. Par exemple la distillerie Caol Ila produit ses propres whiskies, embouteillés sous la marque Caol Ila, mais vous trouverez une multitude de bouteilles où sera mentionné sur l’étiquette “Distilled at Caol Ila distillery” mais la “marque” sur l’étiquette ne sera pas “Caol Ila” mais par exemple “Cadenhead” ou “McCallum”. Il s’agit alors de fûts de whisky distillé à Caol ila mais mis en bouteilles par un tiers. Il est donc important de faire la distinction entre distillerie et marque.
Les embouteilleurs indépendants ont souvent plus de libertés, étant donné qu’ils ne sont pas obligés de coller à l’image de marque de la distillerie. Cela leur permet de sortir des bouteilles souvent plus atypiques que ce que vous pouvez trouver en embouteillages officiels !
A noter que parfois les embouteilleurs indépendants n’indiquent pas le nom de la distillerie qui a produit le whisky. C’est le cas avec la gamme Smokehead que vous retrouvez sur Dugas Club Expert.
Ne soyez donc pas surpris lors de votre prochaine visite chez votre caviste si vous demandez un whisky d’une distillerie en particulier mais que la bouteille ne ressemble en rien aux embouteillages officiels ! Portez votre attention sur la distillerie et sur le type de maturation plus que sur la marque car ce sont ces critères dont va dépendre en grande partie le type du whisky et son profil aromatique.
Généralités
Les éléments les plus simples à identifier sont le nom de la marque, de la distillerie et de la cuvée. Ces 3 éléments ne sont pas systématiquement présents ensemble mais vous trouverez sur chaque étiquette au moins l’un d’entre eux. C’est en général l’élément sur lequel vos yeux vont se porter en premier, car il sera écrit en plus grand, ou dans une police plus grasse ou plus colorée. C’est à partir de ces informations que vous allez être en mesure de déterminer s’il s’agit d’un embouteillage officiel ou indépendant.
Le second lot d’informations importantes concerne l’appellation et l’origine géographique. En effet un Scotch whisky ne répond pas au même cahier des charges qu’un Irish whiskey, Japanese whisky ou encore American whiskey. Nous n’allons pas détailler ici ces différences, cela pourrait faire l’objet d’un autre guide à part entière, mais si vous avez aimé les Scotch whisky que vous avez bu précédemment peut-être voudriez vous continuer à acheter ce type de produit. A noter que la différence entre “whisky” et “whiskey” est purement traditionnelle. L’orthographe avec le E est utilisée principalement en Irlande et aux USA alors que le reste du monde utilise la version sans.
Les éléments principaux à identifier : la distillerie, l’origine géographique et l’âge du whisky
Enfin, dernier point important à identifier, l’âge du whisky. Un petit rappel simple s’impose : dans le monde du whisky, l’âge qui figure sur une étiquette est celui du whisky le plus jeune contenu dans la bouteille. Si une distillerie assemble un Single Malt avec des fûts de 12, 20 et 35 ans, le whisky sera étiqueté 12 ans, quelle que soit la proportion de chaque fût présent à l’intérieur. Certains whiskies n’ont pas de mention d’âge sur leur étiquette. C’est souvent le cas des whiskies contenant au moins un très jeune fût dans leur composition. C’est ce qu’on appelle un NAS, pour “Non Age Statement”.
A ce stade vous êtes déjà en mesure de situer géographiquement le lieu de production d’une bouteille et connaître la durée de maturation du whisky qu’elle contient, et ainsi d’effectuer un premier classement des bouteilles.
Typologie
Maintenant il s’agit de faire la différence entre les différents types de whisky. En effet un whisky est un alcool produit via la distillation d’une bière de céréales. Mais plusieurs céréales sont utilisées à travers le monde selon les appellations, ainsi que plusieurs techniques d’assemblage (nous allons y revenir).
Il y a principalement deux “groupes” de types de whisky :
Les types issus de la production écossaise
Le plus souvent, un seul fût ne permet pas de remplir assez de bouteilles pour les vendre, et la marque fait alors un assemblage de différents fûts pour obtenir une quantité de liquide suffisante. Cette information est identifiable grâce aux mentions “Single” si tout le contenu de la bouteille a été produit dans une seule et même distillerie, ou bien de “blended” s'il s’agit d’un assemblage de fûts provenant de distilleries différentes.
Cette mention est suivie d’un terme permettant d’identifier le type de céréales qui a été utilisé. En effet, dans la tradition écossaise, les whiskies sont séparés en deux grandes classes : ceux produits à partir d’orge maltée, appelés whisky de malt, et les whiskies produits à partir de n’importe quels autres céréales, appelés whisky de grain. Vous trouverez donc sur les étiquettes un des types suivants :
- Single Malt whisky : très courant, whisky issu de l’assemblage de fûts de whisky de malt produits dans une même distillerie.
- Blended Malt whisky : très courant, whisky issu de l’assemblage de fûts de whisky de malt produits dans différentes distilleries.
- Single Grain whisky : peu courant, whisky issu de l’assemblage de fûts de whisky de grain produits dans une même distillerie.
- Blended Grain whisky : extrêmement rare, whisky issu de l’assemblage de fûts de whisky de grain produits dans différentes distilleries.
- Blended whisky : très courant, whisky issu de l’assemblage de fûts de whisky de malt et de grain produits dans différentes distilleries.
Vous pouvez aussi quelquefois trouver des bouteilles issues d’un seul fût, sans assemblage. Ces bouteilles, très prisées des connaisseurs, portent la mention “
Single Cask ”, en plus de l’une de la liste précédente. Dans ce cas, le nombre de bouteilles étant très limité, elles sont souvent numérotées et l’étiquette mentionne le numéro de la bouteille et/ou la référence du fût.C’est ce système de classement qui est le plus répandu, aujourd’hui utilisé dans toute l’Europe et au Japon.

Second point très important, le type de whisky
Les types issus de la production américaine
Aux USA l’écrasante majorité des whiskies sont produits à partir de plusieurs céréales, distillées en même temps. Les plus utilisées sont le maïs, le seigle, le blé, l’orge, et l’avoine. La quantité de chaque céréale détermine la recette, appelée “mashbill”, terme que vous pourrez parfois trouver sur certaines étiquettes.
Ainsi, c’est la céréales principalement utilisée qui détermine le type de whisky :
- Bourbon whiskey : whisky produit avec une majorité de maïs (>= 51%)
- Rye whiskey : whisky produit avec une majorité de seigle (>= 51%)
- Wheat whiskey : whisky produit avec une majorité de blé (>= 51%)
Ces dernières années la production de ces types de whisky se mondialise peu à peu et vous pourrez donc trouver du rye whiskey Allemand par exemple.
Vous voilà désormais en mesure de déterminer d’où provient un whisky, son âge, et de quel type il s’agit, en ayant connaissance de ce que cela implique.
Il vous reste simplement à maîtriser les derniers détails pour être en mesure de décrypter la totalité d’une étiquette comme un pro.
Détails
Parmi les derniers éléments qu’il vous reste à maîtriser, il y en a un qui a une importance de taille : la tourbe. En effet, cet élément organique utilisé pour sécher l’orge, impacte fortement la palette aromatique d’un whisky. En général on l’aime ou on la déteste, et il est donc important de savoir déceler sa présence. Si vous repérez sur une étiquette un des termes suivants : “fumé”, “tourbé”, “smoked”, “peated”, alors ce whisky sera tourbé et aura des notes caractéristique de fumée, de cendre, parfois même des notes pétrolifères, d’hydrocarbure. Mais l’intensité de ses arômes varie d’un whisky à un autre. La puissance des arômes tourbés est mesurée en PPM (“Partie Par Million”, avis aux scientifiques). Vous trouverez donc sur les étiquettes des valeurs comme 20PPM, 40PPM, … le whisky à 40PPM étant plus tourbé que celui à 20.
Le type de fût est un autre élément qui peut fortement influencer les arômes d’un whisky. En effet, les fûts de chêne neufs de premier remplissage sont rarement utilisés. La majorité des whiskies sont vieillis dans des fûts ayant précédemment contenu un autre alcool ou un autre whisky. Les étiquettes mentionnent souvent le type de fût(s) utilisé(s), via des mentions comme “Sherry oak matured”, “Aged in 1st fill bourbon barrel”, ... qui peuvent indiquer le type d’alcool qu’il a précédemment contenu ainsi que le nombre de fois qu’il a été utilisé. Le whisky peut aussi être simplement transféré dans un fût différent pour quelques mois avant la mise en bouteille afin de lui apporter quelques arômes supplémentaires. C’est ce qu’on appelle un “finish” ou un “affinage”, et vous identifierez les whiskies ayant bénéficié de ce traitement via des mentions comme “Finished in sherry casks”, “Port cask finish” … Évidemment ce ne sont là que quelques exemples de mentions indiquant le type de maturation et d’affinage, en faire une liste exhaustive serait très compliqué et seule l’expérience vous permettra d’en connaître tous les détails.
Les détails qui permettent d’affiner la compréhension d’une étiquette
Vous y êtes presque ! Encore trois notions à maîtriser !
Sur les étiquettes vous pourrez parfois lire “not chill-filtered”, “non-chill filtered” ou encore “non filtré à froid”. Ces mentions indiquent que le whisky n’a pas subi de filtration à froid. Ce type de filtration consiste à abaisser la température du whisky proche de 0 degré pour précipiter les molécules les plus lourdes (des molécules grasses pour la plupart) afin de les filtrer. En effet, selon les régions du monde, consommer son whisky avec des glaçons peut être quelque chose de très courant. Et sans filtration à froid, l’ajout d’un glaçon peut provoquer ce précipité parfois jugé disgracieux par les consommateurs, alors que certains embouteilleurs indépendants ont pris le parti d'en faire un atout. C'est le cas de la gamme "Very Cloudy" embouteillée par Signatory Vintage. En revanche, les connaisseurs auront tendance à préférer les whiskies non filtrés, car ils présentent une texture plus épaisse en bouche.
Une autre pratique assez courante est la coloration au caramel. Les producteurs ont le droit de colorer le whisky à l’aide d’un colorant dérivé du caramel (mais n’apportant absolument aucun goût). C’est une pratique courante chez les marques qui souhaitent assurer une certaine homogénéité visuelle dans leur gamme. Rien n’oblige une marque à spécifier sur l’étiquette qu’un whisky est coloré. En revanche, celles qui ne le font pas le précisent souvent via une mention comme “natural color”, “non-coloured”, “uncoloured”, “sans colorant”.
Pour finir, le degré d’alcool, ou ABV, indiqué avec un % comme sur les bouteilles de vin. La plupart des whiskies sont réduits, c’est à dire que lors de l’embouteillage le maître distillateur ajoute de l’eau pour abaisser le taux d’alcool jusqu’à un pourcentage prédéfini, par exemple 46%. Mais il arrive que certains whiskies soient mis en bouteille tel quel, c’est ce qu’on appelle des whiskies bruts de fût, on en anglais “undiluted” / “cask strength”. Ces mentions ne figurent pas toujours sur les étiquettes mais l’expérience vous permettra de savoir à quoi vous avez affaire.
Vous voilà paré pour déchiffrer et comprendre toutes les étiquettes de whisky que vous pourrez rencontrer. Un article suivra sur les types de fûts pour apporter plus de précision sur ce point qui à lui seul est aussi complexe à appréhender que la lecture d’une étiquette.